- Ma Bibliothèque
- 2020 Issues
- Numéro 13
- Cadre international pour l’évaluation des drapeaux…
Cadre international pour l’évaluation des drapeaux rouges dans les pathologies spinales potentiellement graves
POINTS CLÉS
- La plupart des drapeaux rouges sont des fausses pistes : la plupart manquent de preuves, ne sont pas adéquats pour détecter les maladies graves et sont trompeurs lorsqu'ils sont utilisés isolément.
- L'utilisation d'un cluster de drapeaux rouges - c'est-à-dire une combinaison de drapeaux rouges - peut être plus utile pour votre évaluation, bien que des recherches supplémentaires soient nécessaires.
- Les kinésithérapeutes doivent utiliser leur jugement clinique (indice de suspicion élevé), réfléchir sur les caractéristiques de leurs patients (par exemple l'âge, le sexe, les antécédents de cancer) et évaluer les preuves dans leur contexte lorsqu'un drapeau rouge est suspecté (par exemple, prévalence de certaines pathologies, drapeaux rouges potentiellement pertinents) pour évaluer une pathologie rachidienne grave.
CONTEXTE ET OBJECTIFS
L'identification précoce des pathologies rachidiennes graves est d'une importance cruciale compte tenu de leurs conséquences potentiellement dévastatrices. Les drapeaux rouges sont souvent utilisés par les thérapeutes pour aider à identifier une pathologie rachidienne grave, mais il y a un manque de preuves de haute qualité sur leur précision diagnostique. Cet article fournit un cadre complet pour les kinésithérapeutes et les autres professionnels de santé, avec une approche standardisée et cohérente de l'évaluation des pathologies rachidiennes graves dans un contexte musculosquelettique.
Bien que les pathologies graves soient rares, une réorientation et une prise en charge rapides sont essentielles à la réussite.
MÉTHODE
L'élaboration de ce cadre a été dirigée par la Fédération internationale des physiothérapeutes manipulateurs orthopédiques (IFOMPT). Il a été alimenté par les recherches disponibles sur les drapeaux rouges en collaboration avec des chercheurs et des cliniciens ayant une expertise dans la prise en charge des troubles musculosquelettiques.
RÉSULTATS
Ce cadre conseille aux cliniciens de passer par trois étapes dans leur évaluation d'une pathologie grave.
- Déterminer votre niveau d'inquiétude.
Demandez-vous : avez-vous une forte suspicion clinique ? Quel âge a votre patient ? Quel est l'historique de la plainte ?
Réfléchissez aux preuves sous-jacentes aux drapeaux rouges pour la pathologie grave spécifique de votre groupe de patients. Par exemple, pour le cancer, une forte suspicion clinique et des antécédents de cancer sont les deux seuls drapeaux rouges avec une précision élevée acceptable pour identifier le cancer. Pour les fractures de la colonne vertébrale - la pathologie grave la plus courante - un âge plus avancé, une utilisation prolongée de corticostéroïdes, un traumatisme grave et la présence d'une contusion ou d'une abrasion semblent constituer les drapeaux rouges les plus précis, en particulier lorsqu'ils sont utilisés en association (1,2).
- Décidez de votre action après avoir décidé de votre niveau d'inquiétude.
Demandez-vous : à quel point suis-je inquiet ?
Aucun élément préoccupant : vous avez le feu vert pour commencer les séances de kinésithérapie et vous pouvez revenir sur votre décision si certains éléments venaient à changer.
Peu d'éléments préoccupants : c'est un drapeau jaune, ce qui signifie que vous pouvez commencer vos séances tout en conservant une surveillance active [watchful waiting]. Qu'est-ce que ça veut dire ? Vous devez surveiller attentivement les symptômes et les progrès et adapter rapidement les interventions cliniques si nécessaire.
Quelques éléments préoccupants : c'est un drapeau orange NE COMMENCEZ PAS LA KINÉSITHÉRAPIE. Une réorientation relativement URGENTE pour plus d'examen est nécessaire.
Des éléments clairs et graves sont présents : c'est une alerte rouge. NE COMMENCEZ PAS LA KINÉSITHÉRAPIE. C'est une URGENCE claire, une réorientation est nécessaire.
- Connaissez bien vos modes de réorientation.
Suspectez-vous un syndrome de la queue de cheval, un cancer, une fracture, ou quelque chose d'autre ?
-
Syndrome de la queue de cheval :
- IRM
- Scanner si contre-indication à l'IRM
-
Fracture vertébrale :
- Radiographie, une vue latérale est préférée
- IRM si vous souhaitez différencier les fractures ostéoporotiques d'un cancer
-
Pathologie maligne de la colonne
- IRM
- Scanner si contre-indication à l'IRM
-
Infection rachidienne
- IRM
- Analyses de sang - la vitesse de sédimentation des érythrocytes et la protéine Créactive semblent être les marqueurs inflammatoires les plus utiles
- Radiographie des poumons en cas de suspicion de tuberculose
LIMITES
L'incertitude demeure dans ces recommandations, car il y a un manque de preuves de haute qualité sur la précision diagnostique de la plupart des drapeaux rouges.
IMPLICATIONS CLINIQUES
Voici quelques-unes des implications cliniques que nous pouvons tirer de cet article :
- Expliquez à votre patient pourquoi vous posez des questions non liées aux maux de dos. Ces questions pourraient s'avérer effrayantes ou troublantes pour beaucoup de patients. Prenez le temps d'expliquer votre raisonnement, donnez à votre patient le temps de répondre et rassurez-le et offrez-lui du soutien tout au long du processus.
- Si vous avez un fort soupçon, faites confiance à votre jugement. Pour les pathologies malignes, un indice élevé de suspicion et des antécédents de pathologie maligne sont les drapeaux rouges avec une précision diagnostique acceptable.
- Certains drapeaux rouges sont plus importants que d'autres en fonction de la pathologie grave suspectée. Soyez conscient de la prévalence de chaque pathologie rachidienne grave dans les différents groupes de patients et des preuves des différents drapeaux rouges rencontrés.
- Réévaluez et surveillez toujours les progrès. Si vous pensez qu'il n'y a pas d'éléments préoccupants et que vous commencez les séances de kinésithérapie, soyez attentif à tout changement de ces éléments.
- Obtenez de l'aide en cas de besoin et connaissez vos modes de réorientation sur le bout des doigts. Bien que les pathologies graves soient rares, une réorientation et une prise en charge rapides sont essentielles à la réussite.
Voir la figure 1 pour un arbre décisionnel résumant le plan d'action approprié en cas de pathologie spinale potentiellement grave.
+RÉFÉRENCES
RÉFÉRENCES CITÉES
- Downie A, Williams CM, Henschke N, et al. Red flags to screen for malignancy and fracture in patients with low back pain: systematic review. BMJ 2013 11;347:f7095.
- Verhagen AP, Downie A, Popal N, Maher C, Koes BW. Red flags presented in current low back pain guidelines: a review. European spine journal. 2016 Sep 1;25(9):2788-802.